La Parenthèse Beauté

« Ayez du coeur, dites non au foie gras »

Il y a quelques jours, l’association Animal Cross a lancé la campagne « Ayez du coeur, dites non au foie gras« . Vous vous en doutez, cette campagne vise à dénoncer le gavage et les atrocités qu’il engendre. L’association a décidé de demander à quelques personnalités et artistes de servir de porte-paroles de ce mouvement, c’est pourquoi on a pu voir récemment ce genre de photos sur les réseaux sociaux :

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Aujourd’hui, le foie gras est assez controversé. La consommation de foie gras reste une tradition, notamment pendant les fêtes de fin d’année et, pourtant, beaucoup reconnaissent le gavage comme étant une pratique contraire à l’éthique. Les chiffres sont d’ailleurs un parfait exemple de ce paradoxe. En 2012, 72% des français ont déclaré aimer le foie gras (source : TNS 2012). En 2009 (veuillez m’excuser, je n’ai pas trouvé des chiffres de la même année, mais vous le verrez par la suite, l’ordre d’idée aurait été le même), d’après un sondage CSA/SNDA (Société nationale pour la défense des animaux), 44% des français étaient contre le gavage des oies et des canards et 63,2% pensaient que cette pratique était/est cause de souffrance pour les animaux concernés. On se retrouve donc avec beaucoup de personnes qui apprécient le goût du foie gras et également beaucoup de personnes qui sont contre l’élevage et qui reconnaissent que le gavage est une source de souffrance.

Ces chiffres sont malgré tout logiques. Beaucoup de gens savent que le gavage provoque de la souffrance mais il n’y en a pas autant qui sont contre le gavage justement parce que beaucoup apprécie le goût. La question est donc la suivante : le plaisir gustatif vaut-il la souffrance engendrée ?

Inutile de préciser que l’on parle d’un plaisir gustatif de quelques minutes seulement et d’une souffrance de plusieurs jours. Je n’ai pas envie de dire que la question précédente reviendrait à la suivante : « à quel point suis-je égoïste?« … mais presque.

Le goût serait alors l’argument principal qui nous pousserait à continuer à manger du foie gras. Cependant, il n’est pas le seul. D’autres arguments sont avancés :

  • la tradition : le foie gras serait une tradition en France. Déjà, pour ceux qui assimileraient le foie gras à la France, sachez qu’on y est pour rien du tout dans l’invention du foie gras puisque la pratique du gavage des oies remonterait à l’Egypte Ancienne. Ensuite, et quand bien même le foie gras serait une tradition, on peut légitimement se demander si toutes les traditions doivent être conservées. Faut-il rendre l’excision légitime dans les sociétés où elle est considérée comme traditionnelle ? Et oui, on parle bien de tradition et non de religion quand cette pratique précède les religions. Aurait-on dû garder les traditions françaises de torture sur la place publique et ainsi continuer à punir les gens en leur coupant les mains, la tête, la langue et en exhibant, bien évidemment, ces pratiques devant un public ? Parce qu’il me semble que ces pratiques existent toujours et qu’elles nous choquent particulièrement quand on en découvre les vidéos sur Internet…
  • l’économie : la France est le premier producteur mondial de foie gras. En effet, 75% du foie gras mondial est produit par la France. Evidemment, cette production engendre des revenus, pour les producteurs évidemment mais pas que. On peut facilement penser aux effets positifs sur le PIB. Cependant, la notion de richesse et de revenus liée au PIB est de plus en plus controversée quand on sait que la guerre, les catastrophes naturelles, la pollution (etc…) ont un effet positif sur le PIB et sont créateurs de richesse, tout comme le foie gras… En effet, ce qui est assimilée comme une richesse au niveau du PIB ne l’est pas forcément pour une société donnée. Le PIB n’a absolument rien à voir avec le bien être, l’éducation, la liberté… qui sont maintenant des éléments très importants pour analyser la vraie richesse d’un pays.
  • la nature : certains avancent un argument qui peut tout d’abord être séduisant pour défendre la production de foie gras et le gavage des oies mais qui se laisse vite démonter dès lors que l’on réfléchit 2 secondes. Pour ces personnes, les oies se gaveraient elles-même, naturellement, notamment juste avant la période de migration. Je ne peux pas vous en dire beaucoup plus sur leur argumentation car elle n’est généralement pas plus développée que ça. En plus d’être peu développé, cet argument est facilement contestable. Il est vrai que lorsque l’on pense au gavage, on pense souvent aux oies. Cependant, pour produire le foie gras, ce sont presque exclusivement des canards mâles (appelés « mulards« ) et non des oies qui sont utilisés car leur gavage est plus rapide. Et, ces mulards sont des croisements entre une cane domestique et un canard de Barbarie qui est un animal non migrateur. Le canard que l’on gave pour le foie gras n’a donc pas du tout le besoin de se gaver comme le prétende certains. Et encore une fois, quand bien même on accorderait une once de crédibilité à cette thèse, rappelons que les canards gavés pour le foie gras finissent dans un si mauvais état physique qu’ils ont des difficultés respiratoires (car les poumons sont compressés par un foie 10 fois trop gros) et ont de grosses difficultés pour marcher. Donc, les canards migrateurs ne se gaveraient de toute façon pas de cette manière naturellement puisque sinon ils ne pourraient pas faire d’efforts, pourraient à peine bouger et donc ne pourraient pas migrer…

Et puis, il est inutile de comparer un canard dont le foie se retrouvera dans une assiette et un canard migrateur tant les conditions de vie sont différentes. Pendant la période du gavage, la période qui précède donc la mise à mort, « la majorité des canards (87%) sont maintenus dans une cage en plastique ou métallique de 20 cm de large, 50 cm de long et d’une trentaine de centimètres de hauteur, soit un peu moins de la surface d’une feuille A3. Les canards ne peuvent pas se retourner, ni étendre leurs ailes. Leur tête dépasse de la cage pour permettre le gavage. Les 13% de canards restants sont maintenus dans des enclos généralement de 3 m2 pour une quinzaine d’animaux. Les oies sont enfermées dans des cages collectives de 1 m par 1 m pour 3 animaux ou bien en enclos de 3 m par 1 m pour 9 animaux. » (source : Rapport du comité scientifique sur la santé le bien-être). Si vous n’arrivez pas à visualiser, voici un petit aperçu :

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(Je vous épargne les vidéos car je comprends très bien que l’on ait pas envie de voir de telles horreurs, même si ca aide parfois à ouvrir les yeux…)

Evidemment, les conditions sont telles que le taux de mortalité explose. En période de gavage, il est multiplié par un nombre compris entre 10 et 20… D’ailleurs, c’est pour cette raison que la période de gavage ne dure pas plus de 15 jours, sinon il y aurait beaucoup trop d’animaux morts et donc de pertes. Parce que oui, les canards gavés sont malades.

Enfin, pour les personnes qui penseraient que les canards/oies aimeraient être gavé(e)s (parce que oui, certains semblent le penser), sachez qu’on en sait désormais un petit peu plus à ce sujet et que les études ne vous donnent pas raison (ca parait logique d’un côté…). Selon le Rapport du Comité scientifique de la Commission Européenne sur la santé et le bien-être des animaux, « les membres du Comité ont observé qu’avant une séance de gavage, les canards et les oies font preuve d’un comportement d’évitement qui indique de l’aversion envers la personne qui les nourrit et la procédure de gavage. Après une courte période, les oiseaux qui peuvent le faire [c’est-à-dire ceux qui ne sont pas cloîtrés dans une cage] s’éloignent de la personne qui les a gavés ». Voilà…

Après les longues heures de recherche que j’ai pu effectuer pour en savoir plus sur le foie gras, les conditions de gavage et les conditions de vie des canards et oies gavés, il ne me reste plus qu’un seul argument qui tienne debout : le plaisir gustatif. Tous les autres arguments sont facilement réfutables. J’en reviens donc à la question : A quel point suis-je égoïste ? Maintenant, je laisse chacun répondre à cette question…

Je voudrais juste préciser qu’on peut totalement commencer par arrêter le foie gras sans arrêter la viande (dans un premier temps, ou pas). Je peux comprendre qu’arrêter la viande soit un peu plus compliqué car cela entraîne de changer un peu ses habitudes mais, honnêtement, pensez-vous vraiment qu’arrêter le foie gras change les habitudes ? Non. Ca ne coûte donc pas grand chose d’arrêter. Ca ne changera pas les habitudes alimentaires puisque l’on en consomme finalement assez peu souvent. Par contre soyez sûrs que chaque fois que vous direz non au foie gras c’est à au moins un animal que vous accorderez le droit de vivre. C’est donc un tout petit geste mais un grand pas. Si vous décidez alors d’arrêter de consommer du foie gras, vous pouvez vous aussi participer à la campagne « Ayez du coeur, dites non au foie gras ». Pour cela, c’est très simple, il suffit de se prendre en photo et faire un coeur avec ses doigts, au niveau du foie. Ensuite, vous n’avez plus qu’à partager votre photo sur les réseaux sociaux avec le #nonaufoiegras ! 🙂 Voilà un petit exemple de ma soeur qui a rejoins la campagne.

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Vous pouvez également ajouter le petit slogan sur votre photo. Je vous mets juste ici le logo que vous pourrez ajouter sur votre photo grâce à quasiment n’importe quel logiciel de montage ou de retouche.

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Parfois on a l’impression que notre action, à notre petite échelle, ne compte pas… on se trompe. Chaque personne qui prendra la décision d’arrêter de manger du foie gras évitera la mort à quelques êtres vivants. Et puis, voir votre photo ou tout simplement votre engagement peut avoir un effet boule de neige et motiver vos proches à lutter eux aussi contre la cruauté. Un engagement n’est jamais vain, même si on a l’impression d’être trop petit pour lutter.

Si vous avez l’impression que vous êtes trop petit pour pouvoir changer quelque chose, essayez donc de dormir avec un moustique… et vous verrez lequel des deux empêche l’autre de dormir

Le Dalaï Lama

Ne doutez jamais qu’un petit groupe d’individus conscients et engagés puisse changer le monde. C’est même de cette façon que cela s’est toujours produit

Margaret Mead

C’est parce qu’on s’imagine tous les pas qu’on devra faire qu’on se décourage, alors qu’il s’agit de les aligner un à un

Marcel Jouhandeau

Le jour où l’on décide d’agir est le bon jour pour commencer à agir

Proverbe japonais

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